Lorsqu’un enfant ou un jeune adolescent est conduit chez le psychanalyste, il est accompagné par le ou les parents qui ont pris rendez-vous pour lui.
Plusieurs situations peuvent être à l’origine de cette décision.
Dans tous les cas, l’enfant est porteur d’un symptôme qui alerte, inquiète ou déstabilise ses parents.
Un 1er rendez-vous qui réunit l’enfant et ses parents
Lors de la 1ère rencontre, un temps important est consacré à entendre les parents énoncer la difficulté de leur enfant. Le thérapeute interroge plus largement sur les circonstances de la naissance, la fratrie, la famille, les modes relationnels, la scolarité…
Ce discours des parents est prononcé devant l’enfant.
C’est un moment important de la thérapie. En effet, en clarifiant les événements devant le thérapeute, les parents synthétisent l’histoire de l’enfant au sein de la famille et expriment les émotions qu’ils éprouvent. Quel que soit son âge, l’enfant est extrêmement attentif à cet échange dont il est le sujet principal.
Le psychanalyste recueille les informations indispensables pour bien cerner l’environnement de l’enfant et les circonstances d’apparition du symptôme. Plus important encore, le thérapeute entend les émotions des parents : angoisse, culpabilité, tristesse, frustration, colère…
La seconde partie de cette 1ère séance est consacrée à l’enfant seul. Sa parole est recueillie sans témoin. Il est le patient, et bénéficie à ce titre de la confidentialité qui est due à tout patient. Cependant, le thérapeute énonce à l’enfant la règle suivante : s’il le pense en danger, il préviendra ses parents des informations confiées. Il en sera toujours prévenu à l’avance et il sera présent.
Cette règle est également soumise aux parents en fin de séance.
Quand le symptôme de l’enfant est celui de la famille
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Lola, une petite fille très éveillée de 4 ans.
elle refuse d’aller sur le pot ou sur les toilettes pour « faire caca ». Lola exige une couche quand elle sent l’envie venir. Elle a une petite sœur de 9 mois, répond à tous les souhaits de ses parents et de l’école, hormis celui-ci. La maman a pris le rendez-vous, mais elle a envoyé sa belle-mère pour accompagner Lola car elle est « très prise par son travail de commerciale ». Les quatre grands-parents se relaient pour aider le couple dans la gestion des enfants. La mère vient au second entretien à la demande expresse du thérapeute. Elle explique qu’elle a consulté plusieurs médecins pour ce « problème » de Lola. Sa demande est claire : obtenir le plus vite possible que Lola accepte de se passer de couche. Le thérapeute explique à cette maman hyper organisée que sa petite fille accepte de se plier à tout…mais se réserve peut-être un domaine dont elle garde le contrôle. Lola envie sa petite sœur qui reçoit plus de soins et d’attention qu’elle. Cette petite « régression » de Lola donne prétexte à des soins compensatoires. De plus, les consultations auprès de la psychanalyste l’ont placée au centre de l’attention et des préoccupations parentales. Après quelques semaines, rassurée sur sa place au sein de la famille, Lola allait aux toilettes comme les grands.
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Louis a 12 ans.
Il vient accompagné de ses deux parents. Tous deux sont veufs et ont des enfants adultes de leurs précédentes unions. Louis ne parvient pas à dormir seul. Il ne s’endort que dans le lit parental, avec l’un ou l’autre de ses parents (plus fréquemment sa mère). Cette situation le gêne et le complexe. Lors du 1er entretien, la maman raconte qu’elle a manqué se noyer alors qu’elle était enceinte de 8 mois. Elle garde de cet incident une grande angoisse ; elle a eu très peur de perdre son enfant. Cette information, inconnue de l’enfant jusque-là, a permis de libérer beaucoup d’émotion. Une thérapie familiale de quelques séances a fait prendre conscience au couple que l’angoisse de Louis était la leur. Ils ont su, à partir de là, laisser ce « petit dernier » grandir. Louis a pu quelques semaines plus tard s’endormir sans angoisse dans son lit.
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Rémi a 6 ans.
Depuis quelques temps il fait de grandes difficultés pour manger, autant à la maison qu’à l’école. Il n’arrive pas à avaler, refuse de goûter aux plats, a peur de s’étouffer, semble se méfier de la nourriture. Au cours du 1er entretien avec les parents, il apparait que le papa est depuis peu de temps malade du diabète et s’en inquiète beaucoup. Rémi a entendu ses parents parler de régime, d’aliments dangereux pour la santé, il a vu son père s’injecter de l’insuline… Il a fait sienne l’angoisse de son père. À la suite de cette séance et sur les conseils du thérapeute, le père s’est rendu à une consultation chez son médecin, accompagné de son fils. Les mots rassurants et explicatifs du médecin ont calmé les angoisses du père et de Rémi. Ce dernier a repris une alimentation normale.
Ces trois exemples montrent que le symptôme psychique chez l’enfant est souvent symbolique d’une problématique familiale.
Toute la difficulté pour le thérapeute est de faire accepter cette idée à la famille. Beaucoup de parents refusent d’y adhérer et se sentent culpabilisés.
L’enfant a une grande intelligence émotionnelle vis à vis de ceux qu’il aime, en premier lieu ses parents. Comme je demandais un jour à un jeune patient ce qu’il pensait des séances, il m’a fait cette réponse : « ça me plait parce que ça fait du bien à maman ! ».